Dossier complet : La douceur dans l’Islam : Ar-Rifq
Par Tamime Khemmar.
Quelle grande vertu qu’est le rifq (la douceur) et combien de bienfaits et d’avantages cette vertu apporte à l’homme, à la femme et à toute la famille.
Comment n’en serait-il pas le cas alors que le Prophète [ﷺ], celui qui ne dit que la vérité et celui dans les paroles sont une révélation qui lui transmise par Allah dit :
« Si Allah veut du bien pour une famille, Il les guide vers la porte du rifq (la douceur). »[1]
Que signifie le rifq ?
Le rifq est le contraire de la brutalité. C’est la douceur dans la parole et dans l’acte.
C’est le fait de choisir toujours le comportement qui est le plus facile, le plus tempéré et modéré en s’éloignant de la brutalité dans les paroles et dans les actes.
Le rifq signifie aussi le fait d’agir sans précipitation et de prendre son temps dans toutes ses affaires.
Le Prophète [ﷺ] est le meilleur exemple pour apprendre le rifq (la douceur)
Pour s’orner d’une vertu quelconque, il faut d’abord la connaître amplement, savoir qu’elle nous apportera un bien incommensurable et avoir un enseignant qui nous donne un exemple vivant de l’application de cette vertu.
Le meilleur enseignant et le plus grand exemple est sans le moindre doute notre Prophète [ﷺ] qui fut doté à la naissance des plus grandes vertus, puis, qui acquit comme code moral : le Coran.
Allah, soubhânah, dit, (S : 4/A : 68) :
(Tu es certes d’une grande moralité.)
Le prophète [ﷺ] était doux et modéré, rafîq, dans ses paroles et dans ses actes, et il était facile et proche dans son comportement avec ceux qui l’entouraient.
Anass, qu’Allah agréé, disait : – J’ai servi le Prophète [ﷺ] dix années. Il ne m’a jamais dit : « Fi ! » Il n’a jamais dit à une chose que j’ai faite : « Pourquoi tu l’as faite ?! » ni à une chose que je n’ai pas faite : « Pourquoi tu ne l’as pas faite ?! ».
Allah aime le rifq et Rafîq est l’un de Ses nobles noms
Le Prophète [ﷺ] a dit :
« Allah est Rafîq (Doux) et il aime le rifq (la douceur) dans toute chose. »[2]
Ceci devrait nous inciter à nous orner de cette vertu car c’est une des qualités d’Allah, soubhânah, qu’exprime Son noble nom Ar-Rafîq (le Doux). Or Allah aime que Serviteur s’embellisse des qualités de son Seigneur.
Aussi, n’est-il pas digne du serviteur d’Allah d’accourir vers les choses que son Seigneur aime ? Il y trouvera certainement beaucoup de récompenses et d’avantages.
Connais-tu le noble Nom d’Allah : Ar-Rafîq ?
– Ar-Rafîq – Celui qui agit en douceur –
La qualité qu’exprime ce nom est celle du (Rifq) qui signifie la douceur, la facilité, la lenteur et la progressivité dans toute chose. Son contraire est la violence et la brutalité.
Allah est doux dans Son destin, dans Son jugement, dans Ses actes, dans Ses ordres, dans Ses commandements, dans Sa religion et dans Sa législation.
La douceur d’Allah avec le désobéissant est telle qu’Il lui accorde un délai et ne s’empresse pas de le punir afin que ce dernier retourne vers son Seigneur, se repente de son péché et revienne à sa conscience.
C’est pour cela que le musulman doit agir en douceur dans toutes ses affaires et être doux dans tous ses états, loin de la brutalité, de la hâte, de la précipitation et de l’impatience.
Le rifq ouvre les portes des grâces d’Allah
Le Prophète [ﷺ] a dit :
« Allah est Rafîq (Doux) et Il aime le rifq (la douceur). Il donne en raison du rifq ce qu’il ne donne pas à cause de la brutalité et donne plus qu’il ne donne pour aucune autre vertu. »
Car non seulement le rifq apporte à celui qui s’en dote plus que ce qu’apporte la brutalité mais il lui apporte plus d’avantages que toutes les autres belles vertus.
Le rifq est une belle vertu qui embellit celui qui en est doté
Le Prophète [ﷺ] a dit :
« Certes, le rifq (la douceur) ne se trouve dans quelque chose sans qu’il l’embellisse et n’est enlevé de quelque chose sans qu’il l’enlaidisse. » [3]
Celui qui est privé du rifq (la douceur) est privé de tout le bien
Quelle grande parole nous a transmise le Prophète [ﷺ] en disant :
« Celui qui est privé du rifq (la douceur) est privé de tout le bien »[4]
Comme pour confirmer l’importance de cette vertu et la nécessité de s’en doter et de faire le maximum d’effort pour être rafîq (doux) dans les paroles, dans les actes et dans tous les comportements avec l’entourage proche et lointain.
Avec qui doit-on se comporter avec rifq (douceur) ?
Le rifq n’a pas de limite et n’a pas de domaine précis. Il concerne toutes les personnes, tous les actes, toutes les situations… Bref tous les domaines de la vie.
Le Prophète [ﷺ] a dit :
« Allah est Rafîq (Qui agit en douceur) et il aime le rifq (la douceur) dans toute chose. »[5]
Le rifq dans l’appel des gens vers la droiture
Lorsque Allah envoya Moïse et Aaron vers Pharaon, Il leur recommanda de lui adresser une parole douce. Allah, soubhânah, dit, (S : 20/A : 43 et 44) :
(Allez trouver Pharaon dont l’impiété ne connaît plus de limites (43) Adressez-lui des paroles douces qui l’inciteront peut-être à réfléchir ou à craindre son Rabb (Seigneur) (44))
Car les gens ne supportent pas, par nature, la dureté et la violence. Ils apprécient, au contraire, la douceur et la bienveillance.
Or, la repentance et le retour vers la droiture sont en eux-mêmes difficiles et demandent beaucoup d’efforts. Il ne faut pas alors rajouter à cela le poids d‘un discours dur et éprouvant.
Le rifq dans l’enseignement
Lorsque le Compagnon Moucâwiyah As-Soulamî, lors de la salât en groupe, dit à haute voix à celui qui éternua : « Qu’Allah te fasse miséricorde » pensant bien faire, les gestes de réprobation, autour de lui, se multiplièrent pour le faire taire.
À la fin de la salât, le Prophète [ﷺ] lui parla. Il raconta ce qu’il lui a dit :
« Je n’ai jamais vu un enseignant, avant lui ni après lui, meilleur que lui. Par Allah ! Il ne m’a ni grondé ni frappé ni insulté. Il m’a dit : « Rien des paroles des gens ne peut être dit dans cette salât. Il ne doit y avoir que la tasbîh[6], le takbîr[7] et la récitation du Coran. »[8]
Le rifq avec les deux parents
Ceux qui méritent le plus que tu les traites avec rifq (douceur) sont tes deux parents. Allah, soubhânah, dit, (S : 17/A : 23 et 24)
(Ton Seigneur a ordonné que Lui seul soit adoré et que les père et mère soient traités avec bonté. Si l’un d’eux, ou tous deux, doivent atteindre un âge avancé auprès de toi, garde-toi de leur dire : « Fi ! » et ne les gronde pas, mais adresse-leur des paroles douces. (23) Adopte envers eux une attitude pleine d’humilité et de tendresse, et dis : « Veuille, Rabbi (Seigneur), Te montrer clément envers eux, comme ils l’ont été envers moi lorsqu’ils m’ont élevé tout petit. » (24)
Allah nous mis en garde de dire : « Fi ! » à nos deux parents. Ceci nous indique explicitement qu’il ne faut pas leur faire le moindre mal ni par une petite parole comme celle-ci ni par une insulte ou n’importe quelle autre nuisance portée à leur encontre.
(mais, adresse leur des paroles douces) et (adopte envers eux une attitude pleine d’humilité et de tendresse), tout cela est une grande recommandation de la part d’Allah au profit des parents où Il incite les fils et filles bienfaisants à apporter le maximum de rifq (douceur), bonté et bienveillance à leurs parents par la parole, par le cœur et par l’acte.
Puis, Allah nous invite à leur invoquer Sa miséricorde, lors de leur vie et après leur mort, par gratitude envers eux pour avoir pris soin de nous lorsque nous étions faibles et pour nous avoir élevés lorsque nous étions petits :
(Et dis « Veuille, Rabbi (Seigneur), Te montrer clément envers eux, comme ils l’ont été envers moi lorsqu’ils m’ont élevé tout petit. »)
Le rifq avec la femme
La femme est plus douce et plus sensible que l’homme. Elle doit être traitée avec beaucoup de rifq et son mari doit éviter de lui faire du mal par une brutalité verbale ou physique.
Le Prophète [ﷺ] nous a recommandé de prendre soin des femmes en disant :
« Apportez aux femmes le plus grand bien. »[9]
Et nul doute que la chose la plus importante pour la conjointe qui partage la vie de son mari est d’avoir des rapports doux et amiables avec son mari.
Elle ne doit entendre de lui qu’une bonne parole. Les pensées du mari à l’égard de sa femme doivent être positives, dépourvues de tout soupçon et de tout doute et ses gestes loin de toute violence et de toute dureté.
Le rifq que prodiguera le mari à sa femme sera bien sûr partagé par celle-ci.
La femme doit aussi traiter son mari avec le même rifq. Tout cela fera régner la concorde et la sérénité dans la maison.
Une telle ambiance de rifq et de douceur sera le climat le plus idéal pour la croissance des enfants qui seront heureux et calmes loin de toute violence dans leurs actes et entre eux.
C’est pour cela que le Prophète [ﷺ]a dit :
« Si Allah veut du bien pour une famille, Il les guide vers la porte du rifq (la douceur). »[10]
Le rifq avec les enfants
L’enfant a besoin de rifq plus que toute autre personne à cause de sa faiblesse et de sa grande sensibilité.
Il faut permettre à l’enfant d’allaiter sa mère le plus longtemps possible (jusqu’à deux années) afin qu’il profite du lait et de la tendresse irremplaçables de la mère.
Il faut aussi lui donner le maximum de tendresse en l’embrassant et en l’étreignant et que cela soit de la part de son père et de sa mère non de la nourrisse.
Lorsqu’il n’est pas en âge de discerner, avant ses sept ans, il ne faut pas lui demander de rendre des comptes sur ce qu’il fait car il ne comprend pas.
Il faut discuter avec l’enfant, écouter ce qu’il dit et être réactif avec lui.
La plus petite des filles de Médine pouvait prendre le Prophète [ﷺ] par la main et le conduire où elle voulait,[11]sans qu’il n’enlève sa main de celle de la petite.
Même lorsque l’on éduque l’enfant, il ne faut pas le brusquer et le corriger durement. Il faut procéder par étapes et choisir toujours les moyens les plus doux et pendre le chemin le plus fructueux, celui du rifq.
COumar ibn Abî Salamah (Qu’Allah agrée) raconte : « J’étais un petit garçon sous la tutelle[12] du Messager d’Allah [ﷺ], et lorsque l’on mangeait, ma main se baladait dans la grande assiette. Le Prophète [ﷺ] me dit alors :
-Petit garçon ! Dis bismillâh, mange avec ta droite et sers-toi du côté de l’assiette le plus proche de toi.
Depuis ce jour, ceci fut ma conduite lorsque je mange. »[13]
C’est-à-dire que j’applique ce que le Prophète [ﷺ] m’a ordonné de faire et je mange toujours comme je l’ai entendu me le dire.
Nous devons tous apprendre du Prophète [ﷺ] son rifq (sa douceur) avec les enfants et sa grande patience dans leur éducation.
Le rifq avec les animaux
L’un des domaines les plus importants où l’Islam à appeler les hommes et les femmes au rifq (la douceur) est : le rifq avec l’animal.
Être rafîq (doux) avec l’animal qui partage avec nous la vie sur terre, ceci est-il indispensable ?
Bien sûr ! Pour différentes raisons dont nous citerons :
1-C’est une créature qu’Allah a créée. Or, par respect et par vénération envers Allah, nous devons respecter toutes Ses créatures. Surtout les plus développées, qui ont une âme, comme les animaux.
2-Tout ce qu’Allah a créé sur cette terre, Il ne l’a créé que pour nous servir et pour qu’on puisse en profiter. Ne serait-il pas du plus approprié de notre part de respecter ces créatures et de les traiter de la meilleure manière afin d’être reconnaissant envers Allah pour cette grande grâce ?
3- La conduite du Prophète [ﷺ] avec les animaux fut la plus douce et la plus miséricordieuse qui soit. Il nous a aussi recommandé, à plusieurs reprises, de traiter les animaux, et même les insectes, avec douceur. Notre devoir de suivre la Sounna (la conduite) du Prophète [ﷺ] nous guide donc vers le meilleur comportement envers les animaux.
4- Tous les animaux qui nous entourent ressentent, aiment, détestent… Bref, la seule chose qui les différencie de nous c’est le fait de parler et de raisonner.
Notre devoir de miséricorde ne nous dicte-t-il pas de les traiter avec amour, douceur et miséricorde ?
5-Notre vie sur terre dépend de tous les animaux qu’Allah nous a asservis ; nourriture, boisson, vêtements, transport, etc.
La sagesse exige de nous que l’on préserve ce grand trésor, la faune, si précieuse pour notre existence, et que l’on se comporte avec elle de la meilleure manière.
Qu’a dit le Prophète [ﷺ] concernant le rifq avec l’animal ?
Donnez aux animaux à manger, à boire et ne les fatiguez pas
Le Prophète [ﷺ] vit un chameau dont le dos était collé au ventre tellement il avait faim. Il dit alors :
« Craignez Allah dans votre comportement avec ces bêtes muettes ! Faites en sorte qu’elles soient en bonne santé lorsque vous les montez et lorsque vous les mangez. »[14]
C’est-à-dire : craignez qu’Allah vous demande de rendre des comptes à propos de la faim, de la soif et de la fatigue que vous avez causées à ces bêtes.
Donnez-leur donc à manger et à boire convenablement et ne les chargez pas de faire ce qui est au-dessus de leur capacité.
Soyez miséricordieux avec les animaux que vous mangez lors de l’immolation
Un homme allongea un mouton pour l’immoler. Il se mit alors à aiguiser sa lame. Le Prophète [ﷺ] lui dit alors : « Est-ce que tu veux la tuer deux fois ?! Pourquoi n’as-tu pas aiguisé ta lame avant de l’allonger ?! »[15]
C’est-à-dire qu’il ne fallait pas terrifier la bête en lui montrant la lame, mais se doter de rifq (douceur) dans l’immolation de cet animal qu’Allah nous a asservi pour nous nourrir et pour beaucoup d’autres utilités considérables.
Ne fatiguez pas les bêtes qui vous portent
Le Prophète [ﷺ] appela aussi au rifq avec la bête de transport en disant :
« Ne faites pas que les dos de vos bêtes soient des manâbir (tribunes) pour vous. Allah ne les a asservies pour vous qu’afin qu’elles vous portent à un pays que vous ne pourriez atteindre qu’avec une grande difficulté. Néanmoins, Il vous a accordé la terre. Que vos affaires soient réalisées sur son sol.»[16]
C’est-à-dire : ne fatiguez pas vos bêtes ; cheval, chameau ou autres, en discutant entre vous alors qu’elles vous portent, les fatiguant ainsi sans raison. Car, Allah ne vous les a asservies que pour vous transporter et porter vos lourds fardeaux.
Si vous voulez parler, faire des sermons, discuter entre vous, descendez de vos montures, laissez-les se reposer et paître tranquillement et discutez sur le sol de la terre, qu’Allah a réservé à cet usage.
Ceci nous montre à quel point l’Islâm a incité les hommes et les femmes à se doter du plus grand rifq (douceur) avec les animaux, bien avant tout le monde, car ceci est la guidance de Celui qui s’appelle Ar-Rafîq (Celui qui agit avec douceur), Allah soubhânah, le Miséricordieux des Cieux et de la Terre.
Allah est plus Savant.
Notes de l’auteur :
[1] Mousnad Ahmad (24734)
[2] Boukhârî (6024) Mouslim (2165)
[3] Mouslim (2594)
[4] Mouslim (2592)
[5] Boukhârî (6024) Mouslim (2165)
[6] Dire : « soubhân-Allâh » (qu’Allah soit sacré)
[7] Dire : « Allâhou akbar » (Allah est plus grand)
[8] Mouslim (537)
[9] Al-Boukhârî (5185) et Mouslim (1468)
[10] Mousnad Ahmad (24734)
[11] Al-Boukhârî (6072)
[12] Sa mère ‘Oummou-Salamah (Qu’Allah agrée) était l’épouse du Prophète [ﷺ].
[13] Al-Boukhârî (5376) et Mouslim (2022)
[14] Sahîh Abî Dâwoud, Al-Albânî (2548)
[15] Moustadrak Al-Hâkim (7670)
[16] Sahîh Abî Dâwoud, Al-Albânî (2567)